Binance en Syrie : promesse de liberté ou terrain miné ?

Binance fait son grand retour en Syrie. Après plusieurs années passées en dehors du système numérique, le pays peut désormais bénéficier d’un accès à plus de 300 cryptomonnaies. Toutefois, la situation financière et les instituions bancaires s’annoncent comme un obstacle. Tournant historique ou pari risqué ?

Binance revient dans une Syrie sous tension

Depuis 2011, la Syrie est en isolement financier total. Avec les sanctions américaines, l’accès aux plateformes de paiement, aux technologies bancaires et aux cryptos étaient impossibles. Pire, le système bancaire est plus que défaillant.

« Rares sont celles et ceux qui ont une carte bancaire. Nous avons bien des distributeurs de billets – même pendant la guerre, nous en avions – mais peu de personnes les utilisent. Les banques sont presque vides, et la livre syrienne ne vaut rien », déclare une source syrienne sous couvert d’anonymat.

Le retour de Binance – la célèbre plateforme d’échange de crypto-monnaies – acté fin mai dernier, marque cependant une brèche dans un système encore bancale. La décision de la plateforme fait suite à une mesure du département du Trésor américain. Cette dernière lève plusieurs sanctions concernant les technologies de communication et de paiement. L’objectif est de soutenir l’activité humanitaire et la reconstruction du pays à la suite de la chute de Bachar Al-Assad.

Les Syriens en quête d’alternatives

Si Binance revient maintenant, ce n’est pas pour rien. La jeunesse syrienne est connectée, mais privée d’opportunités. Dans les cours des lycées, les jeux mobiles font fureur. Quelques discussions tournent autour des cryptos. Malheureusement, les jeunes se content d’observer les graphiques des cryptomonnaies sans rien pouvoir en espérer.

La livre syrienne a repris un peu de ses couleurs depuis la fin du règne de Bachar Al-Assad. Cependant, on est encore loin de l’âge d’or. Les cryptos se positionnent ainsi comme une alternative économique.

Il faut cependant nuancer. Si la génération Z s’y intéresse, force est de constater que les plus de 25 – 30 ans misent tout sur le dollar US, l’or et les métaux précieux, et ce, bien malgré une interdiction légale de détenir des devises étrangères.

Binance : libérateur ou opportuniste ?

Nombreuses sont les personnes qui saluent l’initiative de Binance. Plusieurs citoyens y voient une réelle opportunité. L’arrivée de Binance pourrait stimuler l’activité institutionnelle et, peut-être, remplir un peu les caisses du pays. Les banques pourraient également s’y intéresser et proposer, à nouveau, des services dignes de ce nom.

De l’autre côté de la barrière, on retrouve de nombreux sceptiques. L’enjeu pourrait être risqué. Les États-Unis se sont longtemps positionné – visiblement à tort – contre la Syrie. Aujourd’hui, le pays « libéré » est encore davantage sous l’œil de l’oncle Sam, car les cryptos pourraient permettre à la Syrie de contourner le système SWIFT.

La proximité et les anciennes relations avec l’Iran n’annoncent rien de bon pour les intérêts américain. Pas question que le pays devienne indépendant, et ce, sans l’assistance et la supervision de l’ouest. Comme toujours.

Rappelons également que Binance n’est pas réellement exemplaire en termes d’humanitaire. L’année dernière, la plateforme gelait, sans raison, les comptes des palestiniens et révélait l’identité des utilisateurs à Israël. Que fera, alors, la plateforme des données des utilisateurs syriens ?

Binance ouvre l’accès à plus de 300 cryptos en Syrie – Et après ?

La plateforme propose effectivement aux syriens l’accès à plus de 300 cryptomonnaies ainsi qu’à des services de paiements transfrontaliers. Cette décision ouvre la voie à une économie parallèle, mais encore faut-il posséder suffisamment de fonds, et la possibilité d’acheter de manière dématérialisée.

Dans la réalité, en dehors du monde numérique et digital des crypto-monnaies, les choses sont très différentes. Les pré-occupations sont tout autres. La guerre est finie, mais les dégâts subsistent et le pays est en ruine. Les bombardements Israéliens continuent. L’armée Iranienne est encore là.

Quels seront alors les réels impacts sur la vie quotidienne ? Et surtout, combien de Syriens sont-ils réellement intéressés ou même aux faits des cryptomonnaies après 14 ans de guerre civile ?


Sources : Binance, Reuters, témoignages

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